mercredi 27 mai 2009

(avec modification)

Je suis élan
fièvre
bête sauvage maison close

héritière tremblante de la foudre
du silence

mardi 26 mai 2009

La fille dans le film a les cheveux coupés courts; elle porte une paire de jeans déchirée aux genoux; elle a perdu son chien. Plans fixes sur ses silences : on voit qu’elle fait des efforts pour ne pas pleurer – la crise de larmes, tant attendue, éclate à la soixante-douzième minute. Le paysage est magnifique : étendues d’eau glacée, grands ifs noirs croulant sous les neiges. Je sens que ce film a été tourné pour moi; j’ai l’impression d’être cette fille. Je suis sensible à cette grâce indicible, presque invisible, qui pourtant la porte d'une scène à l'autre, n’a pas besoin de maquillage pour éclater au grand jour (beauté fragile issue des profondeurs, des chagrins).

Je me demande à quel endroit le tournage a-t-il eu lieu exactement.
Mon chum s’est endormi sur le divan.

vendredi 22 mai 2009

Ma mère et moi, c'est la symbiose. J’imagine des filles qui s’échangent leurs vêtements, se font passer pour des sœurs. Elles partagent des tas de secrets, qu'elles se livrent à bâton rompu en étouffant des rires.

Je vois aussi des fœtus flottant dans leur liquide amniotique – c'est une image qui revient souvent.

Entre l’absurde et le dégoûtant, rien : je n’arrive pas à visualiser autre chose, sinon des situations encore plus creuses, basées sur des schémas reproduits des milliers de fois dans des milliers de films (vilain cinéma américain) : la fille (branchée sur son cellulaire) et la mère (qui passe son temps à faire du ketchup maison pour des enfants qui ne viennent jamais la voir). Elles s'engueulent, puis la mère trouve une bosse sur son sein gauche. Réconciliation, pleurs. La vieille femme, nourrie à la cuillère par la jeune femme, dans une chambre d’hôpital inondée de lumière – le cancer de ma mère m’a fait réaliser à quel point la vie est précieuse.

Pour son anniversaire je lui offre des fleurs, des savons. Je parle sans arrêt - je ne veux pas de ces silences au souper que l’on retrouve sur grand écran, métaphores éculées d’une relation déficitaire : grande table en chêne et belle argenterie, la mère jette une tasse par terre puis quitte la pièce sans dire un mot.

samedi 16 mai 2009

Une amie d’enfance m’invite à prendre un café. Enceinte jusqu'aux dents. Je lui trouve un air bouffi.

Elle ne peut pas s'empêcher de fumer. Le docteur dit qu’arrêter pendant la grossesse c’est pire pour le bébé, à cause du stress. Elle s’en tient à une cigarette le matin, une le soir. Là je fais une exception: ma belle-mère me fait trop chier, faut bien que je me calme en quelque part. Le futur papa, lui, passe à travers ses deux paquets par jour. Va en-dessous de la fan au moins! (En revenant chez moi, j’irai rejoindre mon chum au salon; il interrompra sa lecture pour me dire que mes cheveux sentent le tabac.)

Une heure à l’écouter discourir sur les affres de la vie familiale : elle refuse que la belle-mère prenne en charge la décoration de la chambre. C’est toujours ben pas elle qui l’a fait, c’te bébé-là... Qu’a me criss patience, avec son droit de regard a’ marde!

Nous nous connaissons depuis si longtemps que je ne me souviens plus de ce qui nous unit.

vendredi 8 mai 2009

Vendre des beignes ( en deux séquences)

Des vagues de joie m'engloutissent, ponctuent mes journées: reconnaître des visages qui me sont sympathiques, réussir à faire rire les clients les plus farouches - ceux qui portent leur intransigeance comme un masque.

Mais en certaines heures de lassitude, je nous vois derrière notre caisse enregistreuse comme des bêtes dans leur enclos.

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Un soir je suis si fatiguée que j'oublie de m'arrêter pour écouter le violoniste du métro Sherbrooke.